Les fruits de la Liturgie –
La prière – et la prière avec foi – est fondamentale. Mais il n’y a pas que la prière. Le métropolite Antoine le rappelait : quand vous allez manger, que faites-vous ? – vous priez. Et ensuite ? – vous mangez ! La « liturgie après la Liturgie » signifie que l’« œuvre du peuple de Dieu » se prolonge, non seulement par la prière, première des actions justes, mais par quantité d’actions cohérentes avec les sacrements, particulièrement l’Eucharistie, et avec l’Église elle-même, sacrement de la présence du Christ dans le monde par l’Esprit saint.
L’action de l’Esprit
Le Fils unique et Verbe de Dieu dit en effet par la bouche du prophète Isaïe : « L’Esprit du Seigneur est sur moi. Il m’a oint pour annoncer la bonne Nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté, proclamer une année d’accueil par le Seigneur » (Isaïe 61, 1-2 dans Luc 4, 18-20). De même que le Fils a été envoyé dans le monde, ses disciples, les baptisés, qui sont ses membres, sont envoyés par l’Esprit, pour une après-liturgie. Notre présence dans le monde découle d’une mission. Nous ne sommes pas du monde, mais nous sommes dans le monde par la volonté de Dieu. Et nous y sommes sous la tête du Christ, le Fils de Dieu. Le témoignage des chrétiens dans le monde est « liturgique » parce qu’il est fait en union avec le Christ et son Église : il procède de la grâce du saint baptême et de l’obéissance au Christ. Les baptisés sont des personnes consacrées pour œuvrer avec leur chef, leur Seigneur, le Christ Dieu qui veut sauver le monde en le transfigurant.
Un monde plus juste
Il est de la mission des baptisés d’œuvrer à la transformation et à la transfiguration de la société humaine et de la création tout entière. Il n’est pas vain de vouloir un monde plus juste, plus humain, c’est-à-dire plus divin – un monde où la volonté de Dieu soit faite « sur la terre comme au ciel ». La « liturgie » des chrétiens dans le monde se manifeste comme service des pauvres, des orphelins, des enfants et des femmes souvent victimes de l’injustice ou de la barbarie, de tous les opprimés. La responsabilité sociale et politique des chrétiens est de nature sacerdotale ; elle s’exerce par une « liturgie », c’est-à-dire par des actions concrètes en faveur de l’être humain afin d’édifier une société cohérente avec la volonté de Dieu. Cette liturgie n’est pas une action morale : elle procède d’une vision théologique du monde où le Seigneur est présent par son incarnation. La responsabilité caritative et écologique des baptisés découle, non de modèles pris dans le monde, mais de l’essence même de l’Église qui est la divino humanité du Christ. L’œuvre du Christ consiste à humaniser l’homme au maximum. Tout ce qui est au service de l’humanisation de l’homme relève de la liturgie mise en œuvre par le Christ lui-même dans sa création.
L’avant-liturgie
Le témoignage prophétique des chrétiens dans le monde constitue également la préparation par excellence à la célébration des sacrements et particulièrement de la divine liturgie. Les baptisés y apportent les joies et les peines qu’ils ont rencontrées au cours de la semaine. Si, pendant toute l’année, chaque semaine découle du dimanche précédent, à l’inverse, pendant le Carême, chaque semaine tend vers le dimanche qui vient. L’ensemble de l’Histoire et de la vie sociale qu’elle inclut, découle à la fois de la communion avec Dieu et tend au final (« eschatologiquement ») vers la communion éternelle de toutes les créatures avec leur Créateur. Le service des créatures, avec tout l’amour que le Seigneur a pour son monde, culmine ainsi dans la célébration dominicale et en découle. Le dimanche est à la fois le premier et le huitième jour – envoi en mission pour l’après-liturgie, et appel à la célébration adressé aux chrétiens qui sont dans le monde, au travail, en responsabilité sociale, dans la recherche scientifique, dans la création artistique, dans la préparation de la pâte du monde pour l’offrande eucharistique.