La relation –
La prière de l’Église prend la défense des défunts devant Dieu et demande le pardon de leurs péchés volontaires et involontaires, maintenant et dans le monde qui vient. Elle est un débordement d’amour vers eux par l’intermédiaire du Christ. Mais il est compréhensible qu’on veuille entretenir la relation avec une personne décédée, surtout quand la relation est très forte, très authentique, pleine d’amour et de confiance. Saint Spiridon s’entretenait avec sa fille sur son tombeau. Beaucoup sont tentés de le faire : il est si difficile de vivre après ce départ! Mais toute notre espérance est d’être réunis avec tous nos proches après la Résurrection finale et, si telle est la volonté de Dieu, dans le Royaume.
Réserve
L’Église s’est montrée réservée à l’égard de la conversation avec les défunts, par méfiance à l’égard de ce qu’on appelait la « nécromancie », pratique païenne dangereuse. Les illusions diaboliques sont toujours possibles ; le psychisme (imagination, rêves, représentations, nostalgie, souvenirs, etc.) ne constitue pas une dimension proprement spirituelle. Que faire donc, pour ne pas rester sans rien, avec seulement un affreux sentiment de vide?
Nouvelle relation
Au départ d’une personne chérie, nous apprenons à tisser un nouveau mode de relation avec elle. La relation n’est pas interrompue; elle est changée, ou bien elle est en train de changer, selon notre propre foi dans le Christ, et selon diverses pratiques: prière personnelle à la maison et toute la journée dans notre cœur; offices réguliers à l’église avec la communauté présidée par un prêtre; prière au cimetière où la terre – un petit coin de terre ou de Paradis – est sanctifiée par le corps des baptisés; offrandes faites pour eux, en particulier aux pauvres. Ce que propose l’expérience chrétienne de la relation avec les défunts c’est, plutôt que de leur parler directement, qui est périlleux, de parler d’eux au Seigneur. La relation que nous avons avec les défunts n’est pas duelle: elle est triple – le Seigneur Jésus Christ, notre défunt bien aimé, et nous-mêmes. Nous parlons de la personne au Christ; Celui-ci s’occupe de cette personne et lui transmet l’amour que nous irradions vers elle par lui. Souvent, Il nous envoie à nous aussi beaucoup d’amour venant de cette personne, ce qui est une grande consolation. Il peut nous faire sentir dans quel état elle se trouve, la souffrance ou la paix qu’elle éprouve. Il peut nous révéler si elle se trouve, comme nous l’espérons de tout notre cœur, au Paradis avec tous les justes qui attendent la Résurrection.
Prier les justes
Nous pouvons sans grand risque parler à un défunt, quand nous avons la conviction de la pureté de son cœur, de sa relative impeccabilité. Lui parler alors revient à le prier: « Bienheureux Frère Untel prie Dieu pour moi! prie Dieu pour Untel, pour le monde, pour l’Église, etc. » Mais, il est sage d’avoir de son côté un prêtre, « père spirituel », si nous voulons l’appeler ainsi, que nous prenons régulièrement à témoin de notre relation d’outre-tombe. Écoutons-le avec confiance ; il nous avertira s’il pense que nous nous trompons, il nous protègera des illusions du Malin. Confessons-nous à lui fréquemment, quand nous avons conscience de faire fausse route, par exemple en nous affligeant sur nous-mêmes, en ne croyant pas assez en l’amour de Dieu, en oubliant que le Christ a vaincu le pouvoir de la mort par sa résurrection, ou en nous complaisant dans des images et des souvenirs.
L’avenir
Dans la situation des défunts, c’est, non le passé, ni même le passé commun que nous avons avec eux, qui est important, mais leur avenir, et notre avenir: la rencontre bienheureuse avec le Seigneur, le pardon des péchés commis en cette vie, la Résurrection, la confrontation courageuse et honnête avec le jugement ultime. Par notre relation avec ceux qui se sont endormis dans la Foi, nous préparons leur Salut et le nôtre, car nous savons que nous nous retrouverons devant la face du Christ pour jouir de son indulgence. Nous plaiderons alors les uns pour les autres, comme nous aurons appris à le faire en cette vie, en rappelant à Dieu tout le bien que nos chers « disparus », comme on dit, ont pu faire et dont nous sommes les témoins: « Souviens-Toi, Seigneur, de ton serviteur N…, de sa bonté, de sa patience… » Souvenons-nous de tout ce bien et demandons au Christ de s’en souvenir avec nous pour transfigurer notre propre mémoire en « mémoire éternelle ».