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Quels documents avons-nous de Maxime Kovalevsky ?

Maxime Kovalesky

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L’héritage –

Maxime Kovalevsky, grand compositeur de musique liturgique et pédagogue du chant d’Église, n’a pas laissé seulement des écrits théoriques. Il nous lègue tout un matériel utilisable pour mettre en œuvre son message. Il existe, bien entendu, le considérable travail de composition qu’il a effectué en langue slavonne. Mais nous rappelons ici le patrimoine disponible en langue française. Celui-ci consiste principalement dans une collection complète de partitions pour toute l’année liturgique suivant la pratique du chant liturgique latin.

L’expérience d’une communauté

Ces documents ont été élaborés pour la communauté orthodoxe occidentale constituée pendant la première moitié du 20ème siècle autour du prêtre d’origine vieille catholique Irénée Winnaert et qui avait reçu la bénédiction du patriarche Serge de Russie. Ce mouvement, protégé par le grand saint contemporain Jean de Shangaï et de San Francisco (Maximovic) qui ordonna l’évêque Jean  de Saint-Denis (Eugraph Kovalevsky) devint l’Église Catholique Orthodoxe de France. En 1970, le patriarche Justinien de Roumanie, assuma cette petite Église en tant que diocèse autonome et ordonna pour elle l’évêque Germain. En 1993, le mouvement perdit toute canonicité, en raison des erreurs commises par ses dirigeants. Toutefois,  le patrimoine liturgique élaboré par Maxime Kovalevsky pour cette communauté demeure.

La divine liturgie

Le principe du travail en question est l’utilisation de tons musicaux d’origine latine, analogue à ceux qu’utilise le chant grégorien. Ces huit tons servent pour toutes les compositions liturgiques, aussi bien dans la liturgie gallo-romaine elle-même (selon saint Germain de Paris) ou romaine (liturgique selon saint Grégoire le Grand, dite des Présanctifiés) que dans la divine liturgie d’origine grecque (selon saint Jean Chrysostome ou selon saint Basile). Pour la divine liturgie selon saint Jean Chrysostome, par exemple, Maxime Kovalevsky a laissé deux partitions un peu différentes, la deuxième étant davantage marquée par des compositions (le chant du Credo, par exemple) utilisant des tons slaves, et la première davantage de style latin.

Deux familles musicales

La combinaison des tons slaves et des tons latins est une audace de Maxime Kovalevsky. Il a, dans l’ensemble, utilisé les premiers pour harmoniser les tropaires des douze grandes fêtes de l’année ; son idée était peut-être de faciliter le chant en commun par des paroisses orthodoxes d’origine différente. Toujours est-il que le tropaire et le kondakion de Noël, par exemple, suivent les tons slaves. Pour tout le reste, ce sont les tons d’origine latine qui sont mis en œuvre en français, ce qui produit une appropriation du patrimoine liturgique d’origine grecque et une authentique inculturation.

La mémorisation

Le principe liturgique que suivait toujours Maxime Kovalevsky était celui de la mémorisation ou assimilation de la Parole : notre maître expliquait que c’est ici la fonction pédagogique de la pratique liturgique. La mémorisation s’opère principalement par la méthode du chant responsorial, dont le meilleur exemple est la forme du graduel (prokimenon) qui précède les lectures bibliques ou pastorales. Elle s’opère également par les réponses que le peuple peut apporter aux prières du prêtre ou du diacre. Ceci est articulé avec précision dans les partitions dont il est question ici.

La concélébration

Celles-ci proposent aux trois acteurs liturgiques que sont le sanctuaire, le chœur et le peuple, une cohérence musicale assurée par les enchaînements mélodiques. Par exemple, le prêtre termine l’ecphonèse sur deux notes que reprend le peuple, ce qui contribue a une vraie concélébration. Les paroisses qui utilisent ces partitions ont avantage à organiser des répétitions de chant avec toute l’assemblée (prêtres, diacres, chantres et peuple) de façon à réaliser un mode célébration harmonieux et efficace du point de vue de l’apprentissage des messages divins.

Le patrimoine

À côté des partitions de la divine liturgie suivant les tons latins, il existe les tons latins pour les lectures (épîtres, prophètes, livres historique) et pour la psalmodie, adaptés à la langue française. De plus, Maxime Kovalevsky nous a laissé un petit chef d’œuvre, le Livre des Couronnes. Il s’agit d’une présentation en parallèle des tons latins et des tons slaves pour des textes identiques, par exemple les hymnes du dimanche à la Mère de Dieu (théotokia). Dans ce volume, on trouve également des exemples d’alléluias dans les huit tons latins et des modèles de graduels. Mais, il faut reconnaître que les formes les plus réussies d’alléluias latins se trouvent dans les compositions réalisées par Maxime Kovalevsky pour les partitions de la liturgie gallo-romaine.

Le primat de la Parole

Le but du chant liturgique n’est pas de réaliser une prestation musicale : il consiste exclusivement à servir la parole de Dieu, le Verbe fait chair. Le chant soutient la Parole. Celle-ci demande à être prononcée avec un souffle et un timbre qui l’honorent. Ce n’est pas n’importe quelle parole. La voix humaine, le plus bel instrument du monde, lui sert d’organe. Et l’on sait que les rabbins, et le Christ Lui-même, ne prononçaient pas l’enseignement de façon triviale : ils soutenaient leur message par des rythmes, des mouvements du corps, des gestes, des formes littéraires également, ce qu’a montré le professeur Marcel Jousse, le maître de Maxime Kovalevsky. Les grandes traditions liturgiques de l’Église, issues de l’école du Temple ou de la tradition synagogale, ont toutes élaboré un système de psalmodie fondé sur huit tons fondamentaux. Sur une base qui est la lecture ou la prononciation sur une seule note (recto tono) on développe quatre formes ascendantes et quatre formes descendantes.

Les hymnes

Maxime Kovalevsky nous a laissé également d’autres admirables compositions : ce sont de grandes hymnes latines qu’il a harmonisées pour la langue française. Citons par exemple l’hymne de la Croix, attribuée à saint Venance Fortunat, archevêque de Poitiers à l’époque de sainte Radegonde : « les étendards du Roi s’avancent… » ; ou l’hymne à saint Martin ou à saint Patrick, ou encore l’hymne de l’Avent attribué à Prudence au 4ème siècle : « écoutez, une voix s’élève, qui résonne à travers la nuit… ».

Le système des huit tons latins au service du message évangélique en français est applicable à l’ensemble des offices des heures. Chaque fois que le livre liturgique – Octoèque, Ménologe, Triode, Pentecostaire – indique pour une prière un ton, il  suffit d’utiliser celui qui correspond. Bien sûr, il s’agit ici de la forme la plus simple. Les huit tons latins sont susceptibles, surtout dans les alléluias, et dans les exapostilaires, par exemple, de développements magnifiques, mais on se gardera de toute forme de virtuosité afin de ne pas perdre l’esprit du chant liturgique : on n’est ni à l’opéra, ni au concert, on est à recevoir les messages évangéliques, à les assimiler pour les transmettre ensuite pour le bonheur des hommes.