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Le jeûne, ou se nourrir de Dieu

potager

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La parabole du jardinage –

Il est bon d’arroser les plantes de notre jardin, quelquefois en mettant de l’engrais dans l’eau. Les maraîchers arrosent les champs. Dieu Lui-même donne les pluies généreuses ou modérées et nous le prions « pour l’abondance des fruits de la terre ». Il nous nourrit de ses bienfaits dans la Création et nous regorgeons les uns et les autres des dons qui nous viennent du Seigneur à travers les diverses créatures. Semblables aux plantes de nos jardins, de nos champs ou de nos balcons, nous nous nourrissons de l’abondance qui nous est offerte. Nos vies, comme la terre, débordent des bienfaits divins, qu’ils soient matériels ou qu’ils consistent en sa grâce incréée.

Suspendre l’arrosage

Or, il est conseillé de ne pas arroser tout le temps ou tous les jours. La sagesse du jardinier sait que la plante que l’on arrose constamment prend la nourriture qui est à sa portée et devient dépendante de cette abondance dont elle jouit sans effort. Elle se développe de façon superficielle. Si, au contraire, tu la nourris moins souvent, elle ira chercher sa nourriture en profondeur, elle développera des racines nouvelles et trouvera dans le sol ce qui lui faut. Elle deviendra plus forte, plus autonome, plus libre, ses fruits seront plus mûrs et plus savoureux.

S’abstenir

Il en est un peu de même du jeûne et de l’abstinence. Nous vivons, surtout en Europe occidentale, dans une société d’abondance. Nous avons tout ce qu’il nous faut. La plupart des produits alimentaires sont accessibles à un salaire moyen. Le pouvoir d’achat dont on nous parle tant s’exerce pour une nourriture quelquefois surabondante, trop riche, trop sucrée, trop salée. Certains mangent tout le temps, grignotent sans cesse, sont rassasiés ou ne le sont jamais. Notre civilisation est, à beaucoup d’égard, une civilisation de la satiété. Nous ressemblons à ces plantes trop arrosées ! Et nous sommes souvent superficiels.

Changer de nourriture

Le jeûne et l’abstinence nous invitent à chercher notre nourriture en profondeur. Le Christ notre Maître nous a enseigné à ne pas nous nourrir seulement du pain qu’Il nous donne, en Seigneur et Dieu généreux qui nourrit toutes les créatures, les oiseaux, les plantes, les poissons de la mer et les hommes. L’homme est appelé à chercher dans ses propres profondeurs ce qu’y a déposé la parole divine, celle du Dieu Parole et Verbe qu’est le Christ Jésus, pour s’en nourrir. Des réserves importantes de vérité et de grâce sont disponibles dans nos profondeurs depuis le saint Baptême. Les temps de jeûne ou d’abstinence nous invitent à nous alimenter et à nous abreuver « de toute parole qui sort de la bouche du Seigneur » et qui a été déposée dans nos cœurs : le saint Évangile, les psaumes, l’exemple des saints, les offices liturgiques, surtout la divine Liturgie et la communion eucharistique, dans laquelle le Seigneur se donne lui-même en nourriture et en breuvage.

La nourriture du Maître

Si nous comprenons la parabole du jardinage, nous comprenons également à quel point les temps plus ou moins longs de jeûne peuvent être bénéfiques pour nous. Grâce à eux, invités à chercher l’alimentation de notre corps et de notre âme dans la profondeur de nous-mêmes et dans le terreau de la Tradition biblique et apostolique, nous nourrissant de façon paradisiaque des semences de vérité et de sagesse, et de tout bon fruit  proposé par l’Église, nous fructifierons à notre tour, dans la maturité, l’autonomie, dans l’amour, et la liberté. La nourriture du Fils de Dieu est « de faire la volonté de celui qui l’a envoyé » (Jn 4, 32-34). Nous jeûnons des nourritures de ce monde pour manger à sa table.

Les épreuves cosmiques

Et quand le Seigneur Lui-même permet l’épreuve cosmique de la sécheresse, de la pauvreté et de la faim, nous saurons chercher notre nourriture dans les préceptes d’amour et dévouement au prochain que nous propose comme des mets savoureux le Seigneur au banquet de sa sagesse. Nous pouvons surtout nous nourrir du Nom de Dieu, le nom de Jésus, qui ruisselle d’énergie divine savoureuse, nourrissante et désaltérante. Dans le désert même, que la pluie n’arrose guère, les saints ont poussé leurs racines en profondeur et ont trouvé, par la prière, la source, le puits et la fontaine vivifiante.

(a.p. Marc-Antoine)