L’amour –
Les saints, notamment saint Silouane l’Hagiorite, ont répondu que c’est l’amour. Ce juste de notre temps a surtout souligné que le critère de la vérité est l’amour des ennemis. Les philosophes, comme le grand Descartes, ont dit que le critère de la vérité est l’évidence, ce qui est vrai ; d’autres pensent qu’un raisonnement rigoureux et une bonne argumentation fondent une ou la vérité. Mais les saints vont plus loin : l’amour, particulièrement celui qui répond à la haine et à l’hostilité, rend précisément évident ce qui est bon et utile aux hommes. L’amour est la source de la connaissance et de Dieu et du monde.
La vérité est Quelqu’un
L’expérience des saints et des justes permet d’entendre avec attention ce que dit le Christ de lui-même : « Je suis la vérité, la vie et la voie » (Jean 14, 6). Le critère de la vérité est donc à trouver en Quelqu’un, plus qu’en quelque chose ou dans un système d’idée, quoique celui-ci ait toute sa valeur à titre d’instrument. Or, le critère de la vérité identifié à la personne même de Verbe est précisément l’amour manifesté par la Croix, la résurrection corporelle, l’exaltation et le don du saint Esprit. Une prétendue vérité qui ne se manifeste pas comme amour, amour de Dieu, amour du prochain et amour des créatures, est ainsi une contre vérité, une vérité contraire à la vie, une vérité qui n’aime pas. Au contraire, la vérité comme « révélation » procède de l’amour, y conduit et est guidée par lui.
La rationalité du monde
Cette réponse est vraie dans tous les domaines. Bien entendu, quand le Verbe dit « Je suis la vérité », Il parle de lui-même comme du Logos, le Verbe, la Parole, la Raison, l’Intelligence absolue, non « artificielle », mais divine – la vérité identifiée à la Sagesse prééternelle. Il assume en sa personne divine la rationalité universelle qui s’observe dans la création ou « cosmos », c’est-à-dire « ordre de beauté ». Mais le Christ n’est pas seulement la Raison, la rationalité du monde, et le distributeur de toutes les formes de rationalité qui se trouvent dans la Création, comme l’a vu saint Maxime le Confesseur. Il est la vérité comme révélation. Le Christ, Fils unique et Verbe de Dieu, est Celui en qui s’accomplit toute science, toute connaissance et toute sagesse, parce qu’Il est l’amour en personne. C’est pour cette raison qu’il n’y a pas d’opposition entre la science et la foi.
La vérité comme amour
En fait une prétendue vérité sans amour – qu’elle soit une vérité de foi, de science ou de philosophie – est inutilisable : ou bien elle sera utilisée de façon destructrice, une vérité qui tue, une imposture. Au contraire, la vérité dont le critère est l’amour irradiera toute aspiration au bonheur et au bien des créatures, qu’il s’agisse du bien de l’homme ou de celui des êtres non doués de raison. La vérité comme amour embrasse toutes les formes d’existence – atome, composant des éléments, plante, animal, terre, eau, air… – dans un même amour. L’amour du Créateur est insondable et magnifique : nous le connaissons surtout par le Verbe. C’est pourquoi il est dit que « Dieu aime tant le monde qu’Il a donné son Fils unique » (Jean 3, 16). Cela veut dire que Dieu aime tant le monde qu’Il donne la vérité totale. Les savants, les chercheurs, les artistes, les philosophes, les baptisés… tout homme, dans sa quête de vérité quelle qu’elle soit, peut être guidé par le seul amour. Saint Maxime a écrit que la Croix, comme manifestation suprême et totale de l’amour, est la vérité du cosmos.
