Ces paroles qu’on n’écoute plus –
Avec la reprise des activités scolaires, professionnelles, politiques et avec l’ouverture de l’année ecclésiastique au 1er septembre, la parole qui nous est donnée en ce jour arrive de façon providentielle. On ne parle jamais assez du pardon, ni en paroisse, ni en famille, ni dans les diocèses et les grandes réunions de l’Église. Peut-être croit-on que cela va de soi et que c’est entendu. Peut-être n’entend-on plus cette parole comme si elle avait rabâchée. Peut-être encore fermons-nous oreilles, et les oreilles de notre cœur, à un appel qui dépasse nos forces ou que nous ne voulons pas entendre parce qu’il dérangerait nos plans.
La civilisation biblique
Le pardon appartient à l’expérience biblique. D’innombrables passages de la Parole s’y réfèrent. À notre connaissance, dans aucune civilisation et chez aucun peuple, le pardon n’existe. La raison en est qu’il n’est pas donné à l’homme par lui-même de pardonner. Ce n’est pas dans sa nature. Le pardon est une attitude et un comportement divins révélés au sein du peuple biblique et magnifiés de façon ultime par Dieu Lui-même quand Il monte sur la Croix. Dans le judaïsme, le pardon est continuellement rappelé, sur la base de la Parole elle-même, et le jour annuel du grand Pardon, Yom Kippour, est un des fondements du témoignage juif dans l’Histoire.
La puissance divine à l’œuvre dans le monde
Pardonner, nous enseigne le Seigneur Dieu en ce jour, se traduit par « remettre les dettes ». L’acte dont il est question est d’une puissance exceptionnelle, parce qu’il laisse intervenir une façon divine d’exister au sein de la communauté humaine. Le pardon est une irruption du divin dans la Création et dans la société. À ce titre, l’Église, en tant qu’elle est, non une institution humaine, mais le corps même du Dieu vivant, est, par excellence le lieu divino humain où s’accomplit le miracle du pardon. Remettre la dette, ou les dettes, c’est dire à autrui : « tu ne me dois rien ». Or cette affirmation est très puissante parce qu’elle opère une révolution divine dans tout le système social fondé précisément sur le droit, le devoir et, en général, sur tout ce qui est dû et exigible de la part des hommes et même, pensent les hommes, de la part de Dieu. « Tu ne me dois rien ! » dit chaque homme à autrui, suivant l’exemple divin. Mais, alors tout est possible !
Enfin libres
Le pardon ou remise des dettes instaure une civilisation de la liberté. Il libère de la culpabilité et donne la responsabilité. Il rend possible le changement à la fois de la personne humaine et de son cœur, et de la communauté humaine. Pensons que des pays entiers peuvent trouver un nouveau souffle quand un moratoire ou l’abolition d’une dette nationale sont décrétés. La remise des dettes, comme la remise des peines, permet à l’homme de relever la tête. En ce début d’année et la reprise de tant de belles activités dans l’Église, en famille et dans la société, nous pouvons essayer de pratiquer cette injonction divine. Pensons également à la mort, à notre mort et à celle des autres : comme la mort est légère quand tu t’endors en paix avec tous, tout étant pardonné, et que tu peux ainsi te présenter en paix devant le seigneur, confiant dans son pardon. En effet, comment, si les hommes te pardonnent, et si toi de même tu leur pardonnes, Dieu te refuserait-Il son pardon ?