La sagesse insondable de Dieu –
L’évangile que nous venons d’écouter fait partie des histoires divino humaines les plus touchantes, celles qui ont nourri toute notre vie depuis l’enfance, si nous avons vécu en milieu chrétien. Mais cette extraordinaire célébrité n’épuise pas la profondeur, l’« eau profonde » de la parole évangélique. La sagesse inaccessible, incompréhensible, inconnaissable, sans mesure et inexprimable, fait notre désespoir. Nous désespérons de connaître le dieu inconnaissable qui a créé tous les mondes, qui a parlé par les prophètes et qui, par son saint Esprit, a finalement pris chair de la Vierge Marie afin de nous adresser une parole humaine claire, comme Il le fait aujourd’hui à ses apôtres. « Avance en eau profonde par la prière de ton cœur ! Jette encore le filet de la méditation de l’Écriture ! »
La quête de Dieu
Si nous écoutons l’injonction de notre Maître, si nous poursuivons la quête de toutes les innombrables significations de la Parole, l’organe habituel de la connaissance qu’est notre raisonnement humain se déchirera à un moment, toute notre existence s’enfoncera en Dieu et tendra à s’immerger dans l’abîme de la sagesse et de l’amour divins. Nous connaîtrons alors, comme Simon Pierre, la crainte de Dieu, l’effroi, le saisissement, et la reconnaissance de Jésus comme Seigneur. Quand nous peinions dans la prière et la méditation de la Parole sans l’aide de la Parole en personne, nous ne prenions aucun de ces poissons merveilleux que sont les raisons divines dont parle saint Maxime le Confesseur. Quand le Verbe Lui-même nous enjoint de nous plonger dans la quête de Lui-même, l’obéissance opère des miracles.
Acquérir la crainte de Dieu
Et le premier des miracles est l’acquisition de la crainte du Dieu Homme qu’est Jésus le Messie, notre Maître. Le deuxième miracle est l’acquisition de l’amour pour le Seigneur, cet amour qui bannit la crainte, comme le rappelle saint Silouane que nous fêtons en ce jour : « ne crains pas ! », dit à notre cœur le Verbe en personne. Notre amour pour le Seigneur Jésus, amour né de l’émerveillement, nous fait alors recevoir de lui une force, une confiance, une énergie telles que nous nous sentons capables d’attirer à notre tour à notre Maître tous ceux qui nous entourent. Nous avons envie que tous se réjouissent de notre joie et connaissent le bonheur que nous avons trouvé à nous immerger dans la Parole pour y rencontrer le Dieu vivant. Peut-être « n’ai-je encore converti personne, et il fait nuit », selon le commentaire que fait de cet évangile saint Ambroise.
La rencontre personnelle avec le Maître
Mais, justement, c’est à partir d’une rencontre personnelle, intime, dans le tréfonds du cœur, que nous pouvons parler de notre Maître bien-aimé. Comme les chasseurs ne peuvent parler que des animaux qu’ils ont vus, qu’ils soient ours ou cerfs, de même le cœur humain ne devient théologien, c’est-à-dire, « parlant de Dieu », que lorsqu’il a, enfin, fait sa rencontre, par l’obéissance et par l’amour. Beaucoup d’hommes autour de nous attendent que nous soyons prêts à leur parler du vrai Dieu. Notre prière consiste à demander au Seigneur de nous rendre dignes d’eux, capables de les attirer vers lui, le Patron des pêcheurs et de leurs petites églises en forme de barque. La grâce apostolique, si attendue en notre temps, surgit des cœurs mystiques où la connaissance expérimentale du Christ par le saint Esprit dépasse toute culture et toute intelligence de ce monde.