Évangile et théophanie –
Les péricopes évangéliques des dimanches après la Pentecôte ont presque toutes un caractère théophanique. Guérison à distance de l’esclave du centurion et expulsion des démons sont des manifestations de la divinité de Jésus Christ et de l’Esprit du Père en lui. Aujourd’hui encore, la guérison du paralytique est une théophanie. Si souvent, dans le saint Évangile, le Sauveur Jésus se manifeste comme le Pantocrator, le Maître de tout au ciel et sur la terre, comme Il le dit au Père: « à ton Fils, Tu as donné pouvoir sur toute créature » (Jn 17, 2) et encore : « tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre » (Mat 28, 18).
Le Royaume
Or ce pouvoir est à comprendre, non comme une domination ou un despotisme, mais comme une royauté. Le Fils concentre en lui-même, dans la volonté divine unique qu’Il partage avec le Père et l’Esprit, et dans la volonté humaine unique qu’Il assume comme Dieu Homme, toutes les énergies incréées et créées, toutes les rationalités qui, dans la Création, le font resplendir comme Raison divine et Logos de tout ce qui est. Une théophanie est un resplendissement de la gloire du Verbe, gloire qu’Il tient du Père et qui jaillit de lui par le saint Esprit, lumière supra céleste et divine, amour créateur qui révèle la paternité divine.
La Seigneurie de Jésus
Le Seigneur Jésus se montre, non une sorte de thaumaturge ou de magicien, comme le pensaient Hérode et d’autres, mais homme transfiguré, Adam pleinement ressemblant à son archétype le Fils du Père. Il est Seigneur, non tel un tyran affublé du pouvoir de ce monde, qui triomphe en semant la peur de la souffrance et de la mort, mais comme Roi de son propre Royaume, royaume de paix, de douceur, de mansuétude, de joie, de bienveillance parmi les hommes, royaume enfin de liberté.
Le pouvoir comme liberté
C’est par ce mot de liberté qu’il convient de traduire le grec ‘exousia’ rendu par le mot pouvoir : « à ton Fils, Tu as donné la liberté de toute chair – et non ‘sur’ », si nous traduisons mieux ; et encore : « toute liberté m’a été donnée au ciel et sur la terre ». Le Pantocrator irradie la liberté créatrice de la Divinité, la liberté royale qui libère, qui fait être, qui fait aimer, la liberté dans l’Esprit, extraordinaire capacité, possibilité, potentiel divin et finalement divino humain par l’Incarnation. Le Fils fait chair et fait homme par le saint Esprit assume la liberté de toute chair et la manifeste par sa parole et par ses actes.
Le Libérateur
Le Seigneur Jésus libère en guérissant, en exorcisant, en pardonnant, en enseignant, en ressuscitant, et finalement en se ressuscitant lui-même – manifestation ultime de la liberté divine qu’Il est en Personne. Aujourd’hui nous voyons cette liberté à l’œuvre : « tes péchés sont remis ! » ; « prends ton grabat ! Rentre chez toi ! » La liberté divine apparue en ce jour et dans l’ensemble de la théophanie évangélique n’est ni un caprice, ni une préférence, ni un choix : elle est la puissance d’être et de faire être. Par cette liberté, Dieu Lui-même, disent certains Pères, veut être ! Dieu se donne librement et souverainement d’être, et Il produit librement par engendrement le Verbe, et l’Esprit par jaillissement. La divine et glorieuse Trinité est ainsi célébrée comme liberté absolue, théophanie interne et externe de l’être divin a-temporellement libre !
Les croyants libérateurs
Or, pour notre Salut, et comme le dit le saint Évangile en ce jour, « une telle liberté a été donnée aux hommes ». Ici culmine la théophanie, quand la puissance divine se donne en partage aux créatures comme leur propre liberté, leur propre créativité dans le saint Esprit ! Nous comprenons mieux les commandements à présent : aime ton prochain comme toi-même, par exemple, est le don d’une liberté et d’un charisme divins, la communion à l’amour divin – liberté d’aimer même ses ennemis, liberté de se réjouir, liberté d’être libre et vivant, liberté qui met à mort la mort …