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Homélie du dimanche 29 mars, saint Jean Climaque

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Les absents –

Dans la divine liturgie selon saint Basile, on prie à un moment pour ceux “qui sont absents pour de justes motifs »: cela désigne, bien sûr, tous ceux qui aimeraient tant participer à la célébration et qui, pour des raisons sérieuses de sécurité, doivent aujourd’hui s’en abstenir. Qu’ils sachent qu’ils sont inclus dans la prière de l’Église à titre personnel et par le jeu des diptyques qu’ils nous envoient. On essaye d’aider à s’organiser la participation médiatique des absents, afin que ce soit moins difficile pour eux et pour entretenir l’unité de prière de la communauté. Peut-être pourrons-nous officier cette semaine, par exemple le grand canon de saint André de Crète, mais c’est à confirmer. En tout cas, nous pouvons nous engager à célébrer le dimanche pour le bienfait de tous qui seront rassemblés comme ils le pourront !

La célébration pour le monde

Officier aux côtés du Christ Pontife le Sacrifice non sanglant pour la vie et le Salut du monde entier est vraiment extraordinaire! Cela dépasse même ce que nous pouvons concevoir. Partout où il y a des prêtres, sur la surface de la terre, avec deux ou trois fidèles, il est vital de présenter cette oblation. Ici est la puissance divine du Verbe fait Homme. C’est là, dans l’Eucharistie, dans le Sang très pur versé pour le monde, dans le Corps précieux immolé par amour pour tous, croyants ou non encore croyants, que tout homme et toute créature trouve la vie éternelle. Dans le saint Sacrifice du Dieu Homme il y a toutes les réponses aux questions, souvent angoissées, que se posent nos contemporains. Comme le Christ est Dieu fait chair et fait homme et qu’Il assume dans sa Personne divine toute l’humanité, quand Il s’offre par amour pour tous dans le Sacrifice non sanglant, en fait Il porte en lui-même tous les hommes ; Il porte en lui-même les joies et les peines de tous, Il les sanctifie et, par la puissance de son amour, Il les fait évoluer pour le bien de tous. La divine liturgie est ainsi infiniment bénéfique pour notre planète éprouvée.

Hommes et femmes du désert

Aujourd’hui nous faisons mémoire de saint Jean Climaque. Les saints du désert nous instruisent sur ce que nous vivons actuellement. Saint Jean Climaque et sainte Marie l’Égyptienne sont partis délibérément dans la solitude; ils se sont confinés librement. Personne ne les y a contraints. Saint Jean Cassien dit qu’il y a trois façons pour l’homme de s’orienter vers le Salut. Les uns s’y dirigent d’eux-mêmes par les choix qu’ils font tous les jours; les autres se mettent en route suite à la rencontre d’une personne ou à une parole de l’Évangile – c’est l’exemple de saint Antoine – ou d’un saint; les troisièmes, se convertissent par contrainte: le Seigneur, dans sa miséricorde, trouve le moyen, quelquefois douloureux, de les pousser sur la bonne voie. Telle est notre situation. Ce que nous ne faisons pas de bon gré, un carême digne de ce nom, par exemple, le Seigneur nous pousse à le faire: Il permet ce confinement obligatoire pour que nous le reconnaissions comme Seigneur et Maître de notre vie, que nous nous convertissions, que nous nous repentions de nos fautes, en particulier de celles que nous avons commises à l’égard de la Création, et que nous changions de mentalité et de comportement: “convertissez-vous, disait-Il, car le Royaume de Dieu est tout proche!”

Plusieurs voies

Mais, les membres de cette troisième catégorie – ceux que la miséricorde divine contraint – se répartissent encore en deux genres. Les premiers maugréent, se débattent comme ils peuvent, essayent de vivre tout de même, en temps de confinement, comme d’habitude ; ne rêvent que d’un retour rapide aux habitudes anciennes ; prient pour que l’épreuve soit abrégée ; cherchent à maintenir coûte que coûte un semblant de vie sociale et ecclésiale, ou à contourner les lois, etc. Ils se plaignent, ils se considèrent comme des victimes innocentes et voient des ennemis partout. Les deuxièmes accueillent l’épreuve avec joie, remerciant le Seigneur de les contraindre à ce qu’ils n’ont pas la force ou le courage de faire. Ces derniers considèrent sagement que le Seigneur leur offre ce temps de confinement comme un cadeau. Les premiers sont dans le refus, ils subissent la situation; les deuxièmes sont dans la gratitude, et ils choisissent la croix qui leur est tendue. Comme dans les prisons communistes, où les uns subissaient et les autres choisissaient la réclusion pourtant imposée, nos contemporains, pour les uns sont esclaves de la situation, pour les autres sont libres parce qu’ils disent Oui! Ils obéissent à la volonté de Dieu exprimée par la situation ; et ils cherchent à comprendre le message divin et à lire les signes des temps.

Trop court!

Avec tout cela, il semble que, pour les seconds, en tout cas, le temps de l’épreuve paraîtra trop court. Ce n’est pas en quarante ou cinquante jours que l’homme opère la mutation radicale de son mode de pensée et de fonctionnement. Il faudrait un an de confinement, ou alors neuf mois, le temps d’une grossesse, pour accoucher d’un mode nouveau d’existence. Aurions-nous le courage, et l’humour, de demander l’allongement de la période de confinement? Mais, aurons-nous l’intelligence de profiter de ce temps béni pour nous convertir en profondeur?

Les souffrants

Nous n’oublions pas ceux qui souffrent, les sdf, les pauvres, les malades des hôpitaux, les soignants, tous ceux sur lesquels le poids de l’épreuve pèse plus lourdement que sur d’autres. Mais à eux aussi le même appel est adressé : tirer le meilleur parti pour le Salut des temps qui sont si difficiles… Cette attitude, qui est celle des saints qui perçoivent la présence du Christ en toute circonstance, permet à l’homme de ne pas perdre son temps.