La pauvreté dans l’Esprit –
Le thème de l’argent et des richesses revient fréquemment pendant les dimanches du carême de Noël ou Avent. On l’évoque en vénérant les grands saints de novembre et de décembre : Martin de Tours, Jean le Miséricordieux, Jean Chrysostome et Nicolas de Myre, exemples de générosité à l’égard des pauvres – ainsi que dans l’évangile de presque chaque dimanche de ce mois de novembre. La pauvreté volontaire et la générosité ont leur icône chez les saints de Dieu, mais elles sont l’apanage de la Divinité elle-même. Le Seigneur donna l’exemple de l’appauvrissement quand Il devint homme : Il se dépouilla de toute prérogative et de toute gloire divines, afin de s’approcher de l’homme, de se rendre accessible à lui et de s’enrichir de son amour.
La générosité divine
La générosité également a été enseignée aux Saints par leur Maître. Quoi de plus généreux en effet de la part de Dieu que de se révéler, de s’offrir en communion aux pauvres dont Il est le trésor, de verser son précieux sang et d’immoler son corps très pur pour ses disciples et pour tout homme ? Pendant le carême de Noël, on prépare dans tous les magasins les cadeaux que l’on voudra se faire en famille, entre amis, entre voisins. Les Mages eux-mêmes sont venus vers le Roi du monde en portant des offrandes, très modestes sans doute par rapport au cadeau que le Père céleste faisait de son Fils, mais très sincères et conformes à la dignité de celui qu’ils voulaient honorer, le Seigneur et Maître de tout. Et nous, ce que nous offrons aux pauvres, c’est au Christ que nous le donnons.
Les trois piliers
La prière, le jeûne et l’aumône sont les trois piliers du temps de l’Avent. Ces trois offrandes ont en commun la pauvreté dans l’Esprit. L’aumône est la dépossession pour autrui et l’héritage d’un cœur charitable. Elle profite à celui qui donne, pauvreté qui enrichit ! Jeûner, c’est être libre de toute consolation de ce monde, pour se rassasier de la parole de Dieu et de sa grâce, renoncement comblé par Dieu Lui-même ! Et la prière est un oubli de toute efficacité ; elle ne comptabilise pas, activité totalement gratuite, qui aime et veut ce que Dieu veut. Mais alors, pourquoi prier, si cela ne rapporte rien ? – Pour rien, par amour. Prier, c’est aimer. Faire l’aumône, c’est aimer, déposséder son cœur pour l’amour du Christ. Jeûner, c’est aimer tellement le Seigneur que l’on n’a plus besoin de rien : le vrai jeûne est un oubli du repas. La prière est une immersion en Dieu et un oubli de l’heure. L’aumône véritable est un oubli des besoins de ce monde.
La grande richesse
L’héritage de la vie éternelle, préoccupation du notable de ce jour, est ainsi constitué de l’unique grâce de Dieu. Tu hérites de tout, tu entres dans la condition de fils, à qui le Père dit : ce qui est à moi est à toi, quand tu trouves l’essentiel de ta vie dans la personne de Jésus Christ, dans son Nom béni, dans sa parole, son exemple, ses conseils et ses suggestions de vie. « Que dois-je faire pour la vie éternelle ? », disait-il. Eh bien, pas uniquement « faire », peut-être : mais irradier l’amour ! L’Avent conduit à Bethléem, au dénuement de la grotte, à la louange gratuite des anges, à la paisible respiration des bêtes, à la simplicité des bergers. Il n’y a que les Mages qui étaient très riches : ils ont donné leur or et leurs trésors ; ils ont offert la fatigue du voyage ; ils s’en sont retournés dépouillés de tout, gratifiés de la pure lumière de la connaissance ; ils se sont enrichis de la pauvreté du Créateur, riches de ce rien qui n’est que lumière incréée et immatérielle, dépouillement de tout à la présence du Seigneur bien-aimé. La vie éternelle est une transparence des personnes l’une à l’autre. « Dans la lumière nous verrons ta lumière… » – moins faire, moins avoir, mais être et voir, jouir de la vision de la Personne divine…
(Radio Notre-Dame, « Lumière de l’Orthodoxie », 26 novembre 2017)