« Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                   « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                  « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                  « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                   « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                  « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                    « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                   « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                  « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »              « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                   « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! »                  « Gloire à ta miséricorde infinie, Seigneur, gloire à toi ! » 

Le souvenir de la mort

archimandrite Sophrony

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« Je ne mourrai pas ! » –

L’insensé se croit immortel. Il pense que les autres meurent. Il s’arrange pour ne pas penser à sa propre mort. Blaise Pascal dit qu’un roi privé de divertissement est très malheureux, rien ne le distrayant de la pensée qu’il mourra. Le viveur, quant à lui, pense à la mort et argumente : buvons et mangeons, puisque demain nous mourrons ! Telle est souvent la philosophie de nos amis, quand ils n’occultent pas purement et simplement la mort, le fait de mourir, avec l’argument inverse : si tu penses à la mort, tu perds l’appétit de jouir ! Oublie que tu mourras et faisons la fête ! Bertrand Vergely parle de « mort interdite ». Aujourd’hui l’imposture transhumaniste promet à l’homme qu’il ne mourra plus ! Jouir indéfiniment de cette vie… la belle affaire ! Une non-mort ou prétendue vie sans Dieu, c’est-à-dire sans la possibilité d’acquérir l’amour véritable vainqueur de la mort ? Aimer, écrivait Gabriel Marcel, c’est dire : tu ne mourras pas !

S’y préparer

Les sages ont cultivé la méditation de la mort. Le grand Montaigne a développé la pensée de ses maîtres stoïciens. Philosopher, dit-il, c’est apprendre à mourir, c’est se préparer à la mort. La maturité advient chez l’homme qui sait qu’il est mortel ; une plus grande maturité arrive quand il n’a plus peur de mourir. Le philosophe antique s’habituait à mourir en y pensant, et il se croyait libéré de la mort. Son argument était : pourquoi avoir peur de la mort, puisqu’il n’y a rien ? D’aucuns trouvent ainsi une paix dans le nihilisme. Certains stoïciens se donnaient la mort à eux-mêmes pour prouver qu’ils en avaient surmonté la peur et qu’ils étaient devenus de grands garçons !

La foi

Les martyrs et les saints ont vaincu la peur de la mort, cette peur animale qui peut hanter nos nuits, qui angoisse souvent  l’enfant ou l’adolescent, par la foi dans la résurrection du Christ et dans leur résurrection personnelle. Ils ont cultivé le souvenir de la mort comme la perspective de la rencontre avec leur Seigneur. Ils ont appris à redouter, non la mort, dont le Christ a vaincu le pouvoir, mais le jugement de Dieu. Le chrétien n’a pas peur de la mort. Nous craignons de mourir parce que nous pensons, comme le disait P. Dumitru Stàniloae, que nous ne nous sommes pas repentis de tous nos péchés : nous redoutons d’avoir à rendre compte de notre vie devant le redoutable tribunal de l’amour de Dieu.

L’espérance des croyants

Le courage devant la mort est cultivé par le jeûne, par le renoncement à soi, par l’amour des ennemis, par le repentir, par la confession de la Résurrection et surtout par la foi en la miséricorde du Christ. Toutefois, la pensée de la mort rend l’esprit sérieux. Il est à supposer que jamais, s’il n’avait été donné à l’homme d’être mortel et de le savoir, il ne se serait mis à réfléchir et à penser. Le souvenir de la mort fait naître dans l’esprit humain les pensées les plus sérieuses, les plus humbles, les plus aimantes pour nos proches, les plus reconnaissantes à l’égard des biens que le Seigneur nous a octroyés dans cette vie et à l’égard de ceux qu’Il nous promet dans l’autre. Le souvenir de la mort nous remplit d’un immense espoir, celui de participer à une vie encore plus belle que celle que nous connaissons actuellement, l’espérance de rencontrer le Seigneur face à face, comme le dit saint Paul. Nous pouvons être impatients de mourir, non par mépris pour cette vie qui est si belle, mais par désir passionné de la vie éternelle en Dieu.

Le souvenir de la mort

Nos pères spirituels, saint Jean Climaque ou, plus près de nous, Père Sophrony et tous ceux qui portent la tradition spirituelle des saints Pères, disent que le souvenir de la mort est la base de la vie de l’esprit. Mais ils ne pensent pas seulement à la mort corporelle, encore qu’elle soit redoutable, car celle-ci a été déjà été transfigurée en sacrement de la rencontre par le Ressuscité. Ils pensent à la mort spirituelle, à la mort de l’âme tuée par le péché (archimandrite Dumitru, monastère Nicula). C’est celle-ci qu’il faut surtout redouter. Le Christ le dit Lui-même. Il parle de la fin de cette vie : « insensé ! Cette nuit même il te sera redemandé ta vie ! » (Luc 12, 20). Mais Il parle également de la mort de l’âme quand Il nous apprend à redouter, non pas ceux qui peuvent tuer le corps, mais celui ou ceux qui peuvent ôter la vie à notre  âme (cf. Luc 12, 4-5).

La conscience

Le souvenir de la mort est ainsi la conscience de l’extrême fragilité de l’existence physique. Il est également la conscience de ce que l’homme, par mégarde ou par complicité avec le Malin dont nous demandons à être délivré, en tout cas par mésusage de sa liberté, peut laisser mettre à mort son âme, c’est-à-dire la laisser dépouiller de la grâce du saint baptême. Qu’est-ce qu’une âme morte ? – c’est une âme qui n’exulte plus en Dieu, qui a perdu l’enthousiasme de la foi, qui ne sait plus aimer ni Dieu ni le prochain, ni se réjouir de la beauté de la Création. C’est également une âme qui ne sait pas ou plus se repentir. Gardons-nous de la mort de l’âme par le souvenir de la mort.

> Archimandrite Sophrony